Définition de la dictée à l’adulte
C’est le moyen de faire produire à l’enfant un texte quand il ne peut pas encore graphier seul. L’enfant confie ce texte à l’adulte, qui sait lire et écrire. Dégagé des problèmes matériels du graphisme, il peut découvrir les contraintes propres de l’écrit et leurs différences avec celles de l’oral.
Ensemble, patiemment, enfant(s) et adulte donnent forme à l’histoire qui voit le jour : du jet initial au « beau texte » qui sera imprimé, lu à l’école et à l’extérieur de l’école.
La dictée à l’adulte se pratique entre un apprenant et un expert, qui va mettre ses compétences au service de l’apprenant.
La dictée à l’adulte doit être inscrite dans une situation de communication authentique. Ses enjeux — message qui doit être compris par un ou des destinataires absents — impliquent le respect de conventions qui n’ont aucun rapport avec celles de l’oral, à savoir une structuration cohérente des énoncés, une segmentation de la phrase en mots, une ponctuation, une orthographe.
Il est important de varier les supports, les modes de regroupement et les destinataires.
Modalités
Ce peut être :
- enfant seul/enseignant L’enfant dit, dicte son texte à l’adulte, et le dialogue s’installe entre les 2 personnes. L’adulte est assis à côté de l’enfant, qui le voit écrire. Cela amène l’apprenant à segmenter en même temps que l’adulte et à dicter au rythme de l’écriture de l’adulte.
- groupe classe à l’initial (projet collectif) ; puis petits groupes/enseignant : production collective (situation moins riche mais moins accaparante pour le maître),
- confrontation entre idées des différents groupes si projet collectif.
À quel rythme ?
Les projets d’écriture peuvent être modestes ou ambitieux, brefs ou longs dans la durée mais l’essentiel est qu’ils motivent les enfants en les rendant actifs et acteurs de leurs apprentissages.
Quels déclencheurs ? Quels moyens d’entrées en écriture ? Quelles activités spécifiques ?
- Projet(s) d’écriture et de communication
- Écrits affectifs et écrits fonctionnels
- Productions d’écrits en sciences (cahier d’expériences)
Différents bien sûr selon l’âge des enfants. Ce peut-être, tout petit :
- l’enfant raconte son dessin (on garde en mémoire et on fait entendre à l’enfant une version écrite de son énonciation)
- à partir d’expériences personnelles
- à partir de lecture d’images (images qui donnent à penser, à rêver, parce que susceptibles de plusieurs lectures sollicitant l’imaginaire.) Difficulté : l’enfant doit tout inventer.
- « Les mystères de Harris Burdick », Chris Van Allsburg, École des Loisirs : évoquer l’image « sous la moquette » permet de libérer des peurs, de les évacuer.
- Permettant de rêver « Les crapougneries » : permettent de rêver, car mettent en scène des transgressions d’interdits. Interdit : fouiller dans la poubelle (cf. image polysémique et un peu transgressive du nounours).
- à partir d’albums, ou de contes :
- on imagine la fin (ex. : John Chatterton détective, Yvan Pommeaux) faire écrire une suite possible et confronter avec la vraie histoire ; on travaille ici à développer aussi une compétence narrative
- on réécrit l’histoire à sa façon/on réinvente
- on écrit le texte d’un album sans texte (cf. Boucle d’Or) (Ex. : Le Petit de la poule Père Castor, Flammarion)
- à partir de structures de poèmes (ex : haïkus – poème japonais de 17 syllabes, CP/CE1), style : « dame souris trotte.
- écrire des poèmes, ou une petite histoire, à l’aide de mots-clés.
- écrits fonctionnels : ex. : expliquer une règle de jeu, on fabrique un jeu de mémory, ou de loto. pour emporter à la maison à Noël, il faut inclure la règle du jeu pour pouvoir jouer à la maison…)
- rédiger une fiche technique (comment fabriquer un lampion, avec dessin à l’appui, un gâteau ; Comment fonctionne une lampe de poche…
- des descriptions de paysage, d’objet
- les écrits de correspondance.
- les résumés et récits d’une visite pour l’expliquer aux parents ou à des enfants absents
- des récits d’écrits scientifiques (comptes-rendus d’expériences, cf. documents LAMAP)>
- l’élaboration d’un texte synthétisant un travail en histoire (avec commentaires de documents) ou en géographie (avec schémas et cartes)
- on explique, on commente des photos prises en activité EPS
Pour cela, il faudra souvent utiliser un lexique scientifique et technique :
- pour désigner des réalités techniques (pile, culot, interrupteur, planisphère…)
- pour nommer des opérations (germer, éclore, dénuder un fil, ordonner des événements sur une frise chronologique, situer un lieu sur une carte…)
Difficultés de mise en œuvre
Que fait la classe pendant que le maître est occupé avec un enfant ?
Règle explicite : pendant que le maître est occupé avec un élève, on ne doit pas le déranger. Il faut donc prévoir des tâches individuelles assez longues et absorbantes (ateliers en maternelle). Recours à des temps de présence de l’ATSEM qui « régule » le reste de la classe.
- Si la structure de l’école le permet, on peut mettre à profit le temps de décloisonnement.
- Enfant en difficulté : ce peut-être un travail avec le RASED (travail équi est un extraordinaire moyen pour une meilleure maîtrise de la langue et du langage).
- Gestion des prises de parole des enfants (que tous participent – que la tâche demandée corresponde à leurs capacités – qu’ils s’écoutent, discutent – qu’ils reconnaissent leur texte au final).
- Problème des enfants qui n’oralisent pas.
- Gestion du dit/écrit en interaction avec les enfants.
Difficultés prévisibles dans l’activité elle-même :
- synonymie et précision lexicale
- usage des substituts du nom
- usage des mots de liaison
Nombre d’étapes (3 à 5) × 20 minutes, ceci n’étant pas « péremptoire ».
Objectif(s)
Passer du langage à la langue...
- c’est d’abord et fondamentalement initier l’enfant aux spécificités de l’écrit en le plaçant dans une situation de production
- permettre à des enfants en début d’apprentissage de saisir comment s’élabore un texte, à un moment où ils deviennent capables de concevoir et d’énoncer des messages scriptibles, mas pas encore de les graphier ou de les orthographier sans peine.
- Motiver les enfants et les aider à surmonter les difficultés inhérentes à l’apprentissage de l’écriture pour que très tôt, celle-ci devienne un langage privilégié de communication et d’expression qui les aide à structurer leur pensée.
- L’apprenant parviendra par approximations et ajustements successifs, à dicter une phrase « écrivable."L’apprentissage se focalise sur les signes graphiques et les formes prises par un oral devenu écrit (l’écrit apparaissant en mots séparés les uns des autres.en phrases ponctuées de points, de majuscules…donc présentant une certaine discontinuité.)
- La dictée à l’adulte s’inscrit dans une progression d’apprentissage dont la finalité est de faire accéder l’élève à une écriture autonome et un soutien permanent de l’effort langagier de l’enfant.
Rôle du maître et compétences de l’enfant
- Le maître est le secrétaire, le scribe, le premier récepteur du texte mais il a un rôle actif (on n’enregistre pas passivement les propos des enfants).
- Au niveau du sens (éclaircissement sur le contenu ; exemple : « Moi, je comprends cela. Est-ce bien cela que tu veux dire ? » Le maître demande des explications et l’enfant lève des ambiguïtés).
- Le maître dit ce qu’il écrit, mot après mot.
- Le maître demande à l’enfant de ralentir son débit (ainsi l’enfant prend conscience de la différence entre les 2 énonciations, comprend que ce qui s’écrit peut se relire indéfiniment.)
Compétence : se faire comprendre pour une restitution fidèle
- Intervention au niveau de la conformité avec la langue écrite : exemple : « est-ce que cela peut s’écrire ? Je te relis le texte, tu me dis si cela peut s’écrire. »
- Aide à l’enfant pour :
- le vocabulaire (on sert de « dictionnaire » quand le mot proposé n’est pas adapté
- les structures syntaxiques
- les répétitions (le chat, il est…)
- la ponctuation
- proposer certaines corrections (si l’enfant se trompe de mot, déforme les mots, se trompe sur le genre du mot, sur la morphosyntaxe du nombre ex : des cheval, les désinences verbales-il faisa.)
- le maître relit, pour faire prendre conscience qu’on évite les répétitions, choisit un ordre de présentation commode, qu’on lie les phrases, et pour voir ou l’enfant veut en venir.
On doit dire à l’enfant que l’on doit respecter les contraintes de la langue écrite sinon, dérives : l’enfant ne sera plus exigeant envers lui-même.
Compétence naissante :
- respect de la consigne (exemple : on écrit un texte poétique, un récit, une description de personnes, d’un certain point de vue ; une suite à un texte, etc.)
- le maître ici intervient comme garde-fou par rapport au projet
- quand on dicte, on ne dicte pas n’importe quoi par rapport à la nature de cet écrit.
L’enfant prend conscience des registres différents de l’oral et de l’écrit, et qu’il doit être en conformité avec la langue écrite.
Intervention, rôle de l’adulte :
- Trois rôles : scribe, 1er récepteur du texte et soutien permanent de l’effort de l’enfant
- L’adulte à qui l’enfant dicte doit :
- dire ce qu’il écrit mot à mot
- demande à l’enfant de ralentir son débit (écart entre oral et énonciation écriture)
- Demande des explications, des éclaircissements sur le contenu
- s’étonner, répéter, écrire, manifester son embarras devant la forme de l’énonciation
- proposer certaines corrections (les normes de l’écrit, on ne peut pas laisser l’erreur)
- relire
Bibliographie
- Mireille BRIGAUDIOT, Apprentissages progressifs de l’écrit à l’école maternelle – programmes INRP, Hachette éducation
- Mireille BRIGAUDIOT, Production de récit écrit en G.S, in revue Argos CDDP de Créteil n° 12, 1994
- Anne-Marie CHARTIER, Christiane CLESSE, Jean HEBRARD, Lire, écrire – Produire des textes, Hatier Pédagogie
- GROMER / WEISS, Dire, écrire, Colin
Martine Poirier, CPC